(21 mars, 2022) - Les êtres humains refaçonnent les milieux dans lesquels ils vivent et les villes sont parmi les environnements les plus profondément transformés sur Terre. Une nouvelle étude démontre que les milieux urbains modifient en effet la manière dont la vie évolue.
Une étude pionnière dirigée par des biologistes évolutionnistes de l’Université de Toronto à Mississauga examine si une évolution parallèle se produit dans les villes partout dans le monde. Selon les résultats publiés dans la revue Science, le projet GLUE (Global Urban Evolution Project) a analysé des données recueillies par 287 chercheurs dans 160 villes de 26 pays ayant prélevé des échantillons de trèfle blanc dans leur ville et les régions rurales avoisinantes. L’étude comprend des échantillons de Sudbury, où les travaux et l’analyse de données ont été appuyés par le professeur de biochimie de l’Université Laurentienne, Thomas Merritt, Ph.D., Lila Elizabeth Merritt et l’étudiante de biochimie de deuxième année, Danica Levesque.
La recherche a trouvé les preuves les plus probantes que les êtres humains en général, et les villes plus précisément, sont une force directrice principale de l’évolution de la vie dans le monde. Les chercheurs ont découvert que le trèfle blanc évolue fréquemment à grandeur de la planète en réponse directe aux changements environnementaux qui se produisent dans les milieux urbains.
L’étude GLUE illustre que les conditions environnementales dans les villes ont tendance à se ressembler entre elles plutôt qu’à celles des habitats ruraux avoisinants. Ainsi, le centre-ville de Sudbury se compare mieux à bien des égards au centre-ville de Tokyo qu’aux terres agricoles et aux forêts qui bordent la ville. « Comme la génétique, l’évolution est complexe, a expliqué M. Merritt. Ainsi, plus nous avons d’exemples tirés du monde réel, plus il est facile d’expliquer et de comprendre les complexités de la génétique et de l’évolution. »
Les chercheurs de GLUE ont non seulement réussi à observer l’adaptation générale du trèfle aux villes, mais aussi à déterminer le fondement génétique de celle-ci ainsi que les facteurs environnementaux responsables de l’évolution. Le trèfle blanc produit de l’acide cyanhydrique comme mécanisme de défense contre les herbivores ainsi que pour rehausser sa tolérance au stress hydrique. L’étude GLUE a fait voir que le trèfle poussant dans les villes produit généralement moins de cette substance que le trèfle dans les régions rurales voisines à cause d’une adaptation constante aux milieux urbains.
Ce sont les changements liés à la présence d’herbivores et au stress hydrique dans les villes qui forcent le trèfle blanc à s’adapter différemment que les espèces de trèfle rural. Cela se constate dans les villes ayant des climats variés et a des répercussions qui dépassent largement l’humble trèfle.
« L’une des véritables forces de la Laurentienne, a expliqué M. Merritt, est que, sur le plan géographique, nous sommes à un point limite, car beaucoup d’espèces ne se trouvent pas bien plus au Nord que là où nous sommes. Même si cela peut être perçu comme un défi, du côté scientifique, notre emplacement est un avantage. Nous sommes en mesure de participer à des études comme celle-ci, car nous sommes situés à la limite nord de beaucoup de choses. »
Il est impressionnant de souligner que Danica Levesque a commencé à participer à l’étude GLUE quand elle n’avait que 16 ans et était élève de 11e année à l’École secondaire du Sacré-Cœur. À l’époque, elle a manifesté un intérêt pour la biochimie en communiquant avec la Laurentienne pour s’informer des possibilités de stage de recherche. « Danica est un véritable atout à cette étude, a affirmé M. Merritt. Il est incroyable comme professeur de voir un membre de la population étudiante générer son premier ensemble de données. C’est quelque chose qu’on n’oublie pas. » Cet été, Mme Levesque travaillera dans le laboratoire grâce à une Bourse de recherche de premier cycle du CRSNG.
« Ma participation à l’étude GLUE a été dynamisante, a exprimé Mme Levesque, aussi membre de l’équipe interuniversitaire de ski nordique, et constituait ma première expérience dans un laboratoire. Je me réjouis d’y participer, de me retrousser les manches, d’observer les résultats et d’apporter une contribution à l’étude. Jouer un rôle dans un projet de cette envergure est vraiment extraordinaire. »
Ce projet est en fait un modèle de science inclusive. L’équipe GLUE est composée de femmes et d’hommes en nombre égaux, non seulement des chercheurs chevronnés, mais aussi des étudiants à tous les cycles et de tous les continents peuplés dans le monde. Cette publication n’est qu’un début pour l’équipe GLUE appuyant une collaboration mondiale inégalée.