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Karen J. Pheasant-Neganigwane

Anciens à la une

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Karen J. Pheasant-Neganigwane debout derrière un canoë

 

Maamwi. Together. Ensemble. C’est ainsi que nous comprenons le passé et apprenons à progresser, main dans la main, en tant que communauté. D’autres éléments essentiels à la façon dont nous progressons ensemble sont l’écoute, la compréhension et l’initiation du changement. Karen J. Pheasant-Neganigwane (BA 2003; BA 2011) a rassemblé le courage de s’engager en s’adressant à l’Université Laurentienne, et de poursuivre des études postsecondaires, animée par ce sentiment de solidarité qu’elle avait ressenti sur le campus de Sudbury, au début des années 2000.

Karen a grandi à Toronto, tout d’abord à Cabbagetown, un quartier d’une grande diversité ethnique, où son père travaillait à la construction de la ligne de métro de la rue Yonge. En 1951, son père a quitté la Première Nation Wiikwemkoong, sa communauté sur l’île Manitoulin, en Ontario, puis y est revenu pour trouver femme et avoir des enfants, dont Karen, et est retourné à Toronto avec sa famille. À cette époque, où l’on pensait qu’il valait mieux que les membres des Premières Nations restent uniquement dans leur réserve, il s’agissait d’un exploit inédit. La famille, bien qu’elle ait toujours gardé des liens étroits avec l’île Manitoulin, a fait le choix d’une vie meilleure. Ses parents voulaient l’éloigner, elle et ses frères et sœurs, des pensionnats, ayant survécu à ceux-ci, et voulaient que leurs enfants puissent parler anglais.

L’un des souvenirs préférés de Karen remonte à l’âge de huit ans. Sa mère et sa tante lui ont confectionné une robe de pow-wow qu’elle a porté au beau milieu de la scène de danse, lui donnant ainsi un sentiment de puissance. À l’époque, dans les années 60, les autochtones avaient honte d’être eux-mêmes et de porter des costumes traditionnels. « Je n’avais pas à rougir de ce que j’étais, a dit Karen. Cela m’a remonté le moral. C’est ainsi que j’ai atteint la plénitude et trouvé ma félicité, par notre façon de danser. » Karen a été danseuse à clochettes jusqu’à l’âge adulte et a participé à des compétitions dans toute l’Amérique du Nord.

En 1983, dans la jeune vingtaine, Karen s’est rendue à Wiikwemkoong pour renforcer ses liens avec la terre et les gens, mais y est restée assez longtemps pour élever ses propres enfants et petits-enfants.

Parent monoparentale, Karen cherchait à poursuivre des études comme étudiante adulte et a été ravie de découvrir à l’Université Laurentienne une grande communauté anishinabek. En 2003, elle a décroché un baccalauréat en sciences politiques de l’UL, puis a mis l’accent sur la danse et l’appartenance et sa communauté d’origine. Quelques années plus tard, elle a décidé de revenir préparer un baccalauréat en littérature anglaise, qu’elle a obtenu en 2011.

Karen ne connaissait aucunement les protocoles institutionnels et les méandres de l’établissement. Elle ne savait pas comment rédiger une dissertation ni comment la formater dans un style MLA ou APA, mais a pu compter sur le soutien indéfectible d’une grande communauté composée de professeurs et de collègues étudiants. Elle est particulièrement reconnaissante envers les professeurs, le regretté Lloyd Wagner, Hoi Cheu, Bruce Dadey, Susan Glover, Patti Brace, Shannon Hengen et Alexis Shotwell, pour ne nommer que ceux-ci, notamment au programme de littérature anglaise. « J’ai eu des professeurs exceptionnels à la Laurentienne, se rappelle Karen. Ces professeurs ne sont pas seulement des universitaires reconnus; ce sont des êtres humains pleins de bonté et ouverts à tous, y compris aux étudiants issus de milieux marginalisés. J’ai rencontré chacun de mes professeurs et ils m’ont donné le courage de croire que je pouvais être une personne sûre de moi et intelligente. »

Bien que titulaire de deux diplômes, elle n’avait aucune direction claire, mais elle savait qu’il était temps de quitter la Première Nation Wiikwemkoong en quête d’une vie meilleure. Elle hésitait à quitter sa famille, sa mère et son foyer tout en sachant qu’elle devait se trouver un emploi. Elle avait acquis de l’expérience professionnelle en tant que chargée de cours au Collège Cambrian (2001-2002) dans le cadre du programme de gestion des affaires, offert par l’intermédiaire du Kenjgewin Teg Educational Institute (KTEI), à Mnidoo Mnising, sur l’île Manitoulin, et à l’Université Victoria, au Département des beaux-arts, par l’entremise de l’En’owkin International School of Writing and Fine Arts, à Penticton, en Colombie-Britannique (2003).

Après s’être portée candidate à divers postes d’universitaire dans tout le Canada, Karen a décidé de déménager en Alberta où, inscrite à l’Université d’Alberta, elle a préparé une maîtrise en éducation des peuples autochtones, un parcours de deux ans qui l’a vue accepter par la suite, au Département de l’éducation du même établissement, un poste d’auxiliaire à l’enseignement et de chargée principale de l’enseignement.

Sa réinstallation n’a aucunement été facile, car elle a fait face au racisme et à la discrimination en tant que femme autochtone dans le secteur de l’enseignement et dans sa nouvelle ville. Ce défi n’était pas nouveau pour elle et elle aurait pu en être bouleversée, mais elle a choisi de poursuivre son propre chemin et d’ignorer les préjudices des personnes qui l’entouraient. Faisant écho aux propos de l’honorable juge Murray Sinclair, ancien commissaire de la Commission de vérité et réconciliation du Canada (CVR), aujourd’hui membre du Sénat du Canada, elle indique ce qui suit : « L’éducation est la clé de la réconciliation. L’éducation nous a mis dans ce gâchis, et l’éducation nous sortira de ce gâchis » (CBC, 2015).

En 2016, elle est devenue chargée de cours au Département d’anglais de l’Université MacEwan. À la même époque (2015-2017), elle a également été chargée de cours au Programme de formation des enseignants autochtones de l’Université de Saskatchewan et, peu après, elle a enseigné les études anishinaabe à l’Université d’Algoma (2016).

Aujourd’hui, Karen est professeure adjointe (nomination conjointe) à la Faculté d’enseignement et d’apprentissage, ainsi qu’à la Faculté des arts de l’Université Mount Royal, à Calgary, en Alberta. Parallèlement, elle prépare un doctorat en philosophie (Ph.D.) dans le cadre du Programme d’éducation des peuples autochtones de l’Université de l’Alberta.

En avril 2020, elle a publié son premier livre, intitulé Powwow: A Celebration through Song and Dance, qui est en sa deuxième distribution et en lice pour le prix Yellow Cedar Award 2021 attribué par l’Association des bibliothèques (octobre 2020), qui récompense la non-fiction anglaise accessible aux jeunes lecteurs âgés de 9 à 14 ans, de la 4e à la 8e année. « Le pow-wow est une célébration du chant et de la danse autochtones. À ce titre, elle relate l’histoire de la culture des pow-wow en Amérique du Nord, de ses origines à l’ère de la colonisation, la Loi sur les Indiens et les spectacles du Far West de la fin des années 1800 à la culture florissante des pow-wow d’aujourd’hui. Danseuse de pow-wow de compétition de longue date, Karen Pheasant-Neganigwane est un guide des protocoles, des insignes, des chants, des danses et même de la nourriture que l’on peut trouver dans les pow-wow d’un océan à l’autre, ainsi que du rôle important qu’ils jouent dans la culture autochtone et la réconciliation. »

La fille de Karen, Sophie Pheasant, est, elle aussi, une diplômée de l’Université Laurentienne (BA 2017), éducatrice et actuellement chargée de cours à la Faculté de l’éducation de l’Université Queen’s.