Mme Recollet est originaire du territoire non cédé de Wikwemikong, lieu où a pris racine sa passion pour l’aide à autrui, là aussi où, cherchant à concilier le travail et la famille, au sortir du programme d’études en travail social du Collège Northern, en 2015, elle a ressenti le désir d’élargir ses horizons et ses compétences afin de mieux servir sa communauté.
« L’une des raisons qui m’ont poussée aux études, dit-elle, était de devenir, aux yeux de ma communauté, un modèle à suivre. Il n’est jamais trop tard, et on n’est jamais trop vieux de reprendre le chemin de l’école. »
En 2020, elle s’est inscrite à l’Université Laurentienne, en suivant d’abord des cours en ligne, à temps partiel, avant de déménager à Sudbury pour étudier à plein temps. Le transfert de ses crédits du collège lui a permis de démarrer du bon pied, et le positivisme qui l’anime imprègne tout ce qu’elle entreprend.
« Tout le monde peut avoir une mauvaise ou une bonne journée, mais nous sommes ici, en bonne santé, en train de faire et d’être, dit-elle. La vie est si précieuse, et j’essaie d’apprendre et d’expérimenter autant que possible. Cela me donne de l’énergie et de la vitalité. »
Sa décision de poursuivre des études en service social est fortement tributaire de son identité de femme du clan de l’ours, un clan dont les membres sont connus pour leur rôle de protecteur et de guérisseur. « Dès que j’ai su de quel clan j’étais issue, tout s’est enclenché, dit-elle. Cette découverte a validé ma voie dans la profession d’aide et a confirmé mon désir d’incorporer dans mon travail les visions du monde autochtones. »
Au fil des ans, Mme Recollet a vu sa carrière évoluer, englobant les rôles d’intervenante en santé mentale, de défenseure de la santé maternelle et infantile et d’animatrice d’ateliers de guérison au service des communautés des Premières Nations.
De concert avec sa sœur, elle offre des séances de formation comme la Formation appliquée en techniques d’intervention face au suicide (ASIST) et les Premiers secours en santé mentale, séances très populaires dans les communautés autochtones. Malgré la grande perte de deux de ses sœurs pendant la pandémie de la COVID-19, elle poursuit la mission d’autonomisation individuelle qu’elle menait en commun avec elles. « Même si mes sœurs ont rejoint le monde des esprits, elles sont avec nous, dans nos cœurs et nos esprits, lorsque nous donnons des séances de formation. Leur présence me donne de la force. »
Depuis qu’elle est à l’Université Laurentienne, elle se dit comblée par le soutien de la communauté et les ressources offertes par le Centre autochtone de partage et d’apprentissage (CAPA). « Je fais le rituel de purification chez moi, mais quand je ne le peux pas, je suis heureuse que le CAPA offre un espace de réflexion et de guérison. J’ai même eu l’occasion de communiquer à mes pairs et à mes professeurs les enseignements de la Roue de médecine, créant ainsi des relations de réciprocité en accord avec le système de croyances autochtones. »
Son histoire est aussi celle du renouveau. Au cours de sa vie, elle a exercé diverses fonctions : coiffeuse, organisatrice de mariages, assistante dentaire, formatrice. Ces expériences, alliées à la vie de mère, l’ont transformée en un « couteau suisse » de compétences et d’adaptabilité, comme elle l’indique fièrement. « Je n’ai pas peur d’appréhender un besoin, tant dans ma vie que dans ma communauté, et je m’efforce sans crainte de trouver un moyen de le combler. »
Elle entend regagner le territoire de Wikwemikong et mettre ses acquis au service des besoins particuliers et complexes de sa communauté. Elle entend poursuivre son travail avec sa sœur, en offrant un soutien et des services ancrés dans la culture des populations dites vulnérables.
« Être parent m’a appris des leçons inestimables, mais poursuivre mes études m’a muni des outils nécessaires pour aller encore plus de l’avant. Il n’est jamais trop tard pour apprendre et grandir. »
À l’approche de la fin de ses études, l’histoire de Mme Recollet témoigne du pouvoir transformateur de l’éducation et des vertus impérissables de la persévérance. Elle nous rappelle que la croissance est toujours possible, quel que soit le stade auquel on se trouve dans la vie.